Partager des traditions amérindiennes en famille
Composer des rituels, remercier la nature
Loin de l’image caricaturale « des indiens », nous avons beaucoup à apprendre des peuples racines, de leurs valeurs, leurs attitudes, leurs croyances. En communion avec la nature, ils coopèrent avec elle, ne prélèvent que le nécessaire, la respecte, l’honore… Ils considèrent la terre, comme une mère, à transmettre intacte aux générations futures et dont les hommes ne sont que les gardiens temporaires.
En tant que parents, nous pouvons aider nos enfants à s’éprendre de la nature, la goûter, la ressentir et l’aimer.
Aussi loin que je me souvienne, la nature a toujours été essentielle pour moi. Enfant, nous allions souvent en montagne dans les Vosges ou les Alpes, avec mes parents et grands parents. L’odeur des hautes chaumes l’été, le bruit des ruisseaux où l’on construit des barrages, la cueillette des framboises, le silence de la neige ont transcendé mon enfance.
Adulte, j’ai continué à rechercher la nature dans mes différents lieux de vie. Depuis une quinzaine d’années, j’ai découvert et exploré, à travers les peuples racines, une spiritualité qui allie connaissance, culture et respect de la nature. Lors de stages, j’ai pu rencontrer et apprendre différentes pratiques.
Cela m’a amenée à développer des rituels personnels, en couple et aujourd’hui familiaux et à fabriquer des objets qui célèbrent l’humain, la terre et le sacré.
Chez nous, tous les évènements ou projets d’importance donnent lieu à des rituels de demande ou de gratitude liés à la nature.
Nous décidons en famille ce que nous voulons fêter ou les besoins d’encouragement pour un moment délicat à passer. Dès que c’est possible, nous rejoignons un site que nous avons adopté dans les Vosges.
Nous commençons par nous purifier à la fumée de sauge comme les amérindiens et nous saluons l’univers. Puis nous jouons du tambour, chacun à notre tour, tout en confiant nos demandes, nos réussites, nos joies et nos remerciements au soleil et à la terre. Notre fils prolonge ces moments en jouant longtemps au tambour, en imitant les chants amérindiens. Il y prend un plaisir certain !
Nos randonnées sont aussi des occasions de cueillettes de plantes pour les tisanes, les sirops, les confitures… Comme les peuples racines, je remercie ces plantes qui se « donnent à nous » comme les légumes que nous cultivons.
Nous avons aussi instauré « la bougie ». Il s’agit, le soir, à la lumière des bougies de remercier pour les bonnes choses de la journée et de rendre hommage à la terre qui nous nourrit, à l’eau qui nous abreuve, ... Nous ne sommes pas toujours assidus, c’est néanmoins un moment de ressourcement et de cohésion familiale et une opportunité de nous rapprocher de la nature.
Ces pratiques remontent à loin pour nous. Avant de concevoir un enfant puis pendant ma grossesse, nous avons beaucoup chanté et fait du tambour avec mon compagnon. Après la naissance de notre fils, nous avons organisé un rituel d’accueil, au son du tambour, en saluant les 4 directions, l’eau, le soleil, la terre mère… Notre fils a beaucoup évolué cette année et nous préparons un rituel pour marquer ce passage.
Ces idées vous tentent ? Inventez, expérimentez, partagez avec vos enfants. Un arbre, un jardin, un rivage, sont autant de prétextes à côtoyer la nature.
Et vous, quelles sont vos traditions de passage ? de fête ? de gratitude ? Associent-elles la nature, les saisons ? Quelle relation vivez-vous avec la nature ? Faites-vous des récoltes en famille ? Offrez-vous à vos enfants des moments de liberté, de jeu, d’exploration dans la nature, quitte à revenir maculés de boue ?
Fabriquer un « medecine bag » avec vos enfants
A l’origine, c’est un objet sacré, de pouvoir et de protection, porté par les hommes medecine des nations indiennes. Il contient la médecine personnelle, reçue à l’adolescence suite aux rites de passage, propres à chaque peuple (quête de vision, recherche de l’animal totem…).
Ici, nous pouvons l’utiliser dans notre vie quotidienne, pour nous donner du courage, de la force, nous centrer, nous respecter. A nous de définir la valeur que nous souhaitons lui accorder.
Mode d’emploi
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1ère étape :Réunissez les ingrédients :
- un cuir le plus souple possible (peau d’agneau ou cuir refendu) facile à travailler. Faites le tour des cordonniers de la ville, certains donnent gratuitement, d’autres font payer, 15 € environ le kilo.
- des matières fines, sèches, de taille réduite : terre, pierres, graines, perles, plumes, cuir, mini-mots, cheveux, dents … -évitez ce qui est putrescible-, à collecter avec vos enfants. Pensez au sens : pourquoi ces matières, ces objets ? Quels symboles pour vous ? Comment donnent-elles ou révèlent-elles force, goûts, capacités ? En quoi sont-elles protectrices pour vous, vos enfants ?
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2ème étape :Préparez-vous avec vos enfants à fabriquer votre/leur « objet de pouvoir »
Prenez quelques minutes de calme, plantez vos pieds dans le sol, demandez de l’inspiration à l’univers, … et faites confiance à votre créativité. Remerciez l’animal qui s’est sacrifié pour sa peau, la nature et les humains.
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3ème étape :Créez la forme
- Posez votre morceau de cuir sur une assiette à dessert, faites le contour et découper avec de gros ciseaux. Le cuir étant une matière noble, rentabilisez-le au maximum. Eventuellement, faites un test en tissu ou avec un morceau du cuir abimé.
- Humidifiez-le très légèrement (absorbez le surplus) ou cracher dessus pour l’assouplir et lui donner une forme. Rappelez-vous que vous fabriquez votre «médecine personnelle » exprimant votre pouvoir. Pour les amérindiens, il est normal d’associer des substances corporelles.
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4ème étape :Remplissez le sac
Une fois le cuir assoupli, mettez les objets au centre, vrillez-le sous forme de bourse et fermez-le avec une lanière de cuir. Pour cette dernière, dosez entre esthétisme et solidité. Le nœud doit être durable puisqu’un medicine bag doit rester fermé. Privilégiez les nœuds de marine sous forme de 8, faites-vous conseiller à ce sujet. Coupez ce qui dépasse et utilisez une colle à bois pour le fermer, ou, au contraire, laissez-le flotter. En cousant le cuir, des formes rectangulaires sont aussi possibles.
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5ème étape :Décorez-le à l’extérieurIl peut être porté en collier, en bracelet, à la taille, à la ceinture, dans la poche, le sac… Ce peut être un bijou, un sac à trésor de pirate, un medecine bag traditionnel, une simple bourse… à votre guise !
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6ème étape :Chargez-le d’intention et pouvoirComme il s’agit d’un objet spirituel, je vous suggère de lui donner des intentions positives. Chargez ensemble celui de vos enfants.
De nombreuses photos existent sur internet.
Pour en savoir plus sur les rites, lisez des récits écrits par des indiens natifs, je vous recommande aussi les ouvrages de Maud Séjournant, Luis Ansa, Miguel Ruiz et Eric Julien.
Paru au printemps 2017 dans le numéro 18 de PEPS, le Magazine de la parentalité positive